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You shouldn't mumble when you speak
17 octobre 2015

"Life will break you. Nobody can protect you from

"Life will break you. Nobody can protect you from that, and living alone won't either, for solitude will also break you with its yearning. You have to love. You have to feel. It is the reason you are on earth. You are here to risk your heart" a écrit Louise Erdrich en 2006. Je suis restée interdite un moment, presque dix ans plus tard. J'ai fixé en réfléchissant mon café dans cette tasse qui j'ai ramené d'Espagne. En la tournant, j'ai retrouvé ce qu'elle disait. "Baila bajo la lluvia", danse sous la pluie chica, danse sous la pluie. Dans mes oreilles, en aléatoire, un mauvais groupe en boucle me chantait "If you don't try you'll never fly but you gotta be brave". Sous mes vêtements empilés, entassés, serrés contre ma peau et moi dessous dissimulée. J'avais moins froid d'un coup, j'avais mes couleurs à l'interieur qui étaient encore en train de changer. Le courage en signe, c'est les deux mains ouvertes devant, paumes face l'une à l'autre, parallèles, et qu'on fait avancer. Le courage chica, le courage.

J'ai fouillé dans tout ce que j'avais téléchargé ces derniers temps. Toute cette base immense, que je cherche, je garde et que j'oublie. Et sur lesquels je retombe comme des cadeaux oubliés. Les livres que j'achète et qui m'arrivent par paquet entier, et es robes aussi. En ce moment, elles ont des oiseaux partout et mes élèves me font des bec sur leurs bouches avec leur pouce et leur index rapprochés.

Dans mes dossiers, je suis tombée sur Amélie Poulain, que je n'avais vu qu'une seule fois, lors de sa sortie. Je ne sais plus pourquoi, j'ai des vagues souvenirs de Paris. A l'époque c'est là qu'habitait le garçon que j'aimais, et je prenais le train souvent pour aller le retrouver. J'étais au lycée, j'avais les cheveux roux et courts,et je savais dire des phrases en vietnamien qui n'étaient jamais assez bien. Em la mot com cùu hong nho. Je suis un petit mouton rose, puisque j'en avais qui ornés le pyjama que je portais. C'était le début de mon amour pour les langues. Comment ça marche les mots, comment arrive t-on à les lier. Dix ans plus tard, j'ai des manuels d'italien, de polonais, de slovène et d'allemand et plein de dictionnaires éparpillés. J'apprends toujours les couleurs et les sentiment. Les nombres, les mois et les saisons. J'écris dans des carnets, et je conjugue les verbes qui me sont essentiels. Aimer, partir, danser.
Il y a dix ans, j'étais au lycée donc, et ma vie était pareille qu'aujourd'hui. Folle, tourbillonnante et agitée. Et comme j'ai beaucoup de chance, il y a toujours eu tellement de poésie. Dans la vieille annexe fatiguée, on avait découvert un secret. Sous l'escalier du bâtiment gris, il y avait un vieux piano qui dormait. C'était une minuscule salle, et plusieurs matin dans la semaine on s'y installait. Pendant que les lycéens se réveillaient en fumant leurs cigarettes et en parlant des relations entre eux qui ne cessaient de changer. J'étais là dans cette cachette, et je l'écoutais jouer. J'ai mis du temps à me rappeler son prénom, et je m'en veux de ce que ma mémoire essaie déjà d'oublier. Antoine. Thomas. Nicolas. Il s'appelait Nicolas, et il jouait les musiques qui le touchait. Il apprenait l'anglais tout seul, et les sons aussi. Il m'apprenait à jouer La valse d'Amélie, et je devais la jouer sans faire d'erreurs, sinon il fallait recommencer. Je jouais toujours la première, et après je l'écoutais. Alors il s'installait sur le vieux tabouret, et il posait doucement ses doigts sur le clavier. Lui, il faisait toujours Comptine d'un autre été, et je regardais ses mains s'agitaient. Le piano était toujours désaccordé, mais il n'y avait jamais de faute dans la musique qu'il jouait. On était dans une classe d'artistes déjà faussement désabusés. Lui en cinéma, moi en théâtre. On passait des heures dans des salles mal éclairées, à filmer ou répéter. Et le matin, je l'écoutais. Je ne sais pas ce que ça fait, de grandir comme ça dans un environnement pareil. L'art, la musique, la poésie. Faire semblant de mourir encore et encore sur un sol plein de poussière. Partir trois jours à Paris voir le dernier Caravansérail du Théâtre du soleil. Se construire avec ce qu'on voit, écoute, ressent. Les rapports à rendre sur les spectacles qu'on allait voir le soir, tard. Ceux où j'avais des mauvaises notes, toujours. Jusqu'à.
Jusqu'à ce que je déchire le dernier que j'avais écrit. Lisible, scolaire, moyen et petit. J'étais une lycéenne, et j'avais une professeur bien trop tournée vers les arts et la poésie. J'ai écrit le suivant comme j'écris ici. Avec des jolies phrases, des rimes, et des sentiments qui finissent toujours en métaphores que je n'arrive jamais à arreter. Des dessins. De la couleurs. Une page de plus, et une écriture très mouvementée. Pas droite. Pas alignée. Avec des ratures et des sauts de lignes non respectés. Et ma première bonne note, mon premier succès. Très bien madame, très bien. Moi et mon écriture, moi toute nue dans tout ce que je racontais sur les pièces qui venaient de se jouer. Ma vie, mes émotions, ce que je croyais avoir compris et ce que ça me faisait. Ma version des choses, ma version des faits. Qui n'est pas forcement la bonne, qui n'est pas forcement la vraie. Mais l'écriture, l'écriture, l'écriture. Que je n'ai plus jamais arrêté, et qui ne m'a jamais vraiment quittée. Parce que j'ai eu la chance de grandir ici, et d'entendre presque tous les matins un piano désaccordé. Qui sonnait bien quand même, qui nous permettait de se couper du monde un instant, de pouvoir nous recentrer. Les deux mains ouvertes et parallèles devant. Le courage on a dit, c'est le courage qu'on fait avancer.
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Commentaires
E
Je ne commente pas mais je lis, tout le temps. Et ces mots, comme beaucoup des tiens, m'ont fait frissonner. Merci d'avoir le courage, encore, toujours.
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