Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
You shouldn't mumble when you speak
31 janvier 2016

Nos tasses devant nous, et nos chemises à motifs.

blabla3

 

Nos tasses devant nous, et nos chemises à motifs. Des pois, des rayures et sur moi, des lapins. Thé au coquelicot dans mes mains et pour elles deux, thé au jasmin. Nos cheveux plein de pluie, et nos mines fatiguées d'avoir trop marché. Alors les sentiments, les rires, les histoires de coeur et de cul pendant que nos infusions infusaient. Mes ongles sur mes lèvres, et moi qui racontait à quel point comme j'avais morflé ces derniers temps, et tous les reproches qu'on m'avait fait. D'être une mauvaise amie, de ne pas savoir écouter. De n'être occupée que par les titres des gens, de ne les choisir que parce qu'ils étaient intéressants. J'étais tellement effarée par la quantité de plaintes que j'avais mangé, que j'étais allée trouver mon barbu parisien pour demander mais tu trouves que je suis intéressée? Mais est ce que tu as cru que les sentiments que j'ai, c'était pour son statut à lui? Et j'étais vraiment horrifiée en attendant qu'il me réponde que non, j'avais une boule au ventre de penser qu'on pouvait croire ça de moi puisque c'est vraiment l'opposé quand je rencontre les gens. Je me fous des diplômes, des postes, des statuts et des fonctions. Je n'accorde de l'importance qu'à ce que je ressens quand je suis près d'eux, à ce que l'on partage et à ce qui tisse les liens ou les laisse filer. Et elles de me confirmer la même chose, thé bouillant sur nos doigts frigorifiés, mais non mais n'importe quoi rassure toi. J'ai laissé échapper un soupir un peu trop long, et j'ai souri longtemps.

C'est compliqué, j'ai l'impression de n'avoir le temps pour personne. Je suis plongée dans mes failles et mes schémas, mes mailles et mes filets trop serrés. C'est peut être vrai que je ne pense qu'à moi en ce moment, mais je ne peux pas trop faire autrement. Je suis née il y a deux ans, et tout est nouveau pour moi. Qui je suis, ce que je veux, qui j'ai envie de devenir et qu'est ce que ça fait, de vouloir aller mieux. Je ne sais rien, j'ai besoin de me comprendre et ça passe peut être par des phases où je ne suis pas vraiment là, pour écouter. Ca me blesse quand on me dit que je delaisse. Mais comment faire si je veux vraiment essayer pour une fois, si je veux vraiment apprendre et avancer. Mais ça me fatigue, je disais en soufflant sur mon thé, ça me fatigue ces sortes de jalousies et ma vie imaginée. Le fantasme de ma vie quand je dis que j'écris, quand les gens relaient mes articles, mes tweets, mes mots, mes phrases et mes pseudos. Cet autre blog où on vient me demander d'assister au lancement d'un livre, où on scrute ma trace sur les réseaux sociaux et où on vient mettre des likes virtuels un jour sur une dizaine de mes photos. Où on me dit des belles choses aussi, comme ce garçon trans qui m'a avoué qu'il relisait parfois mon message d'encouragements quand il ne se sentait pas bien. Que faire, quand on me dit ça? Comment ne pas chavirer quand des inconnus me disent que je les aide, que je suis une motivation importante pour eux, pour continuer.

J'ai laissé les filles au coin d'une rue, et j'ai filé avec mon vélo rouge sous la pluie, sur les rails du tramway. Je me suis posée à mon pub du moment préféré, mes murs bleus et jaunes et ma place attitrée. J'ai sorti de mon sac ce livre que je lis enfin, depuis des mois qu'il m'attend sur mon chevet. Les actes manqués par poignées dans les pages, mes doigts qui suivent les mots et mes yeux qui clignent un peu trop. Et ça ne passe pas Il y a des affolements qui ont cette intensité. Alors j'ai bu dans mon grand verre, et j'ai grimacé. Et ça ne passe pas et ça ne passe pas et ça ne passe pas. Putain la vie putain les coïncidences putain forcement c'est ce Despentes là qu'on m'a prêté. L'espoir et le désespoir, les relations qui se font et se défont et moi toute seule devant ces paragraphes avec mes questions. Et cette frustration tenace, collante, poisseuse et agrippante. Le propriétaire du livre en filigrane sur toutes les pages qui parlent de sentiments, de cul et de sentiments encore. Ce qui bat, ce qui s'agite, ce qui griffe et ce qui mord.

J'ai refermé mon bouquin qui me parlait trop, et j'ai trinqué avec la soeur d'A. qui venait d'arriver. Qui m'a invité à la même table que ses amis, et je me suis retrouvé en face de très jolies personnes avec beaucoup de choses à raconter. J'ai ri, j'ai bu encore, j'ai bu beaucoup trop, j'ai même parlé avec une jolie brune qui connaissait la langue des signes, et avec qui on n'arretait pas de dire avec les mains "oui oui c'est vrai". J'en ai oublié d'aller à la soirée de lancement d'un livre sur le féminisme où j'étais invitée, mais j'étais beaucoup trop occupé à m'amuser. A dire à A. en costume qu'il était beau et à lui offrir pour les un an de son établissement un petit sac, avec dedans mon cadeau. Il a ouvert grand les yeux, et puis ses bras pour me remercier. Je lui avais acheté un petit dinosaure en plastique, et j'étais sure que ça lui plairait. Ce si grand garçon qui aime batman et les dinosaures, les montres de Del Toro et les films gores. J'ai perdu ma concentration alors que la jolie blonde au rouge à lèvres foncé m'offrait encore un verre, dans lequel un shooter venait de tomber.

On a convenu d'un vrai rendez vous qu'entre nous deux avec la soeur d'A., que je passe ma vie à croiser mais jamais à prendre enfin le temps de la rencontrer. Alors qu'elle parle plusieurs langues, qu'elle a un chien beaucoup trop gros et des milliers de choses à raconter. Alors promis, vendredi prochain, tu me raconteras la Chine, les garçons et tu me parleras de ton frère qui est toujours si discret. J'ai repris mon vélo, mon sac plein de verres et de livres et par dessus moi, la pluie. J'ai roulé longtemps et je crois que c'était la tempête, la vraie. Je ne voyais pas très bien, j'avais de l'eau qui me coulait sur le visage mais je suis à peu près sure que je souriais. Je crachais les gouttes de pluie, j'écoutais ma musique et je m'amusais de cette chance que j'avais. De rencontrer tous ces gens, toujours passionnants, des vies folles qu'ils menaient. En poussant ma porte, j'étais trempée et j'ai tout laisser tomber. Mon vélo, les vêtements, mon bonnet noir plein d'eau et mes lunettes pleines de buée. J'ai tangué jusqu'à mon lit, et j'ai réussi à attraper mon telephone pour envoyer à A. "I'm proud of you" avec plein de points qui s'exclamaient. Le lendemain matin, mon ancien professeur de salsa par message pour me demander mais c'était toi en vélo à deux heures du matin, je t'ai hurlé dessus mais tu n'as rien entendu. Pardon pardon, j'ai tapoté, je ne t'ai pas vu, j'avais mes écouteurs et beaucoup trop d'alcool en moi qui tournoyait. J'ai promis un verre à une prochaine soirée, et il semblerait que je retourne bientôt danser. Ça fait longtemps, je dirais même que cela fait des années. Danser dans les bras des autres, mes robes qui volent, et mon coeur toujours emballé. Je crois qu'il me tarde de reprendre et voir comment ça fait. Commencer la guitare, continuer l'allemand, recommencer à danser, la main des garçons entre mes omoplates, leurs bras quand ils te font tomber en arrière mais qu'ils te rattrapent toujours pour de vrai, et moi et mon souffle coupé.

Je suis née il y a deux ans, je danse, je parle en plusieurs langues, je joue, je bois, j'écris, je ris. J'ai des sentiments que je n'arrive pas à dissoudre dans le temps et c'est embêtant mais ce n'est pas le plus important. Je vis, je me reconnais dans les reflets des miroirs, et mes poumons de nouveau né commence à peine à se décoller. Ca me suffit, et c'est bien assez. L'intensité, l'intensité, l'intensité.

Publicité
Publicité
Commentaires
You shouldn't mumble when you speak
Publicité
Archives
Publicité