Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
You shouldn't mumble when you speak
16 juin 2015

Les trajets en voiture ont des goûts de 2013,

Les trajets en voiture ont des goûts de 2013, sans que je ne sache pourquoi. Ma toute petite vieille voiture, le soleil, le chocolat sur mes doigts. Le soleil brûlant et les vitres ouvertes. Mes feuilles volantes sur les sièges arrières, les dessins partout ailleurs. Le volant usé, les lunettes de soleil, les chansons chantées trop fort. L'album de Keisha en boucle, parce que. Le même que j'écoute à nouveau. Dans une voiture de service qu'il faudra rendre, bientôt. Et tous mes trajets que je maudis, qui me fatiguent. Qui deviendront des souvenirs, plus tard. Ma moi-même plus grande, un sourire sur les lèvres, qui se rappellera. Tu te rappelles quand tu hurlais shut up and get inside, et que tu riais? Tu te rappelles la couleur du ciel, en 2015?

Le vernis sur tes ongles, c'est la couleur de la nuit qui s'en va. Les paroles d'une petite fille difficile, devant le violet sur mes pieds. La couleur du ciel, en 2015, c'est celle de la nuit qui s'en va. C'est la couleur des verres qu'on trinque en parlant anglais avec un accent islandais, italien, allemand ou russe. C'est la couleur des cheveux court contre mon épaule, ceux de celle qui est reparti chez elle, très loin. Toujours très loin. C'est la couleur de petit D., qui me dit que les répétitions de la kermesse, ça lui donne envie de pleurer. C'est la couleur de ma colère, froide, contre cet administratif qui n'a tellement pas de sens. Qui me traite en numéro, en formulaire, en rendez vous. C'est la couleur de mon short et ma veste à capuche que je porte désormais au travail. C'est la couleur de mes pas de danse sur le parking, qui n'ont jamais arrêté. Même si on peut me voir depuis les bureaux. Surtout si on peut me voir depuis les bureaux.

C'est la couleur de la vraie nuit qui s'en va, quand on parle tellement longtemps qu'elle devient grise. A travers les feuilles des arbres, à travers les fenêtres aux montures blanches. Devant ce pont que j'aime tellement, avec du vin blanc à nos pieds. Qu'elle devient grise, qu'elle devient violette, qu'elle devient rose. Qu'on a tellement parlé qu'on s'endort, et que je cale ma tête contre le mur, le plus loin possible de. La plus petite possible dans ce lit si grand. Ce milieu si creux entre nous, ce centre que j'aimerais traverser. Mais. C'est compliqué. C'est toujours compliqué. Alors. Juste ma main,  parfois sur la peau tatouée. L'aube qui se lève entre les persiennes, les yeux en face des miens qui s'ouvrent. Détourner la tête.

C'est la couleur de toutes les photos que je numérise, du passé. La jeunesse de mes parents, la beauté de ma mère, mes cheveux si longs, si vrais. Moi petite, moi moyenne, moi grande. Moi de cette année, de la couleur de la nuit qui s'en va. Mes mots dans un carnet, les photos à côté collées. Moi sous ma paume, de toutes les couleurs de mon enfance, de mon adolescence, de mon âge maintenant qui ne rime avec rien. Pas petite, pas moyenne, pas grande. Une capuche sur mes cheveux blonds, sous la pluie, pour faire des bêtises inédites. "3750 d'euros d'amende, et un travail d'interêt général", lisait la voix d'A sur mon canapé, "t'as vraiment envie de ça?". La couleur de nos rires à toutes les trois, bientôt dix ans après notre rencontre. La couleur de notre constat sur nos vies, tu sais, qu'en ce moment, ça va.

Tu sais, en ce moment, ça va.

Publicité
Publicité
Commentaires
You shouldn't mumble when you speak
Publicité
Archives
Publicité